Gérard Daniel
Le Préfet de Brooklyn 1956-2018
C’est aux frontispices de l’année 2018 que survint le départ du Préfet de Brooklyn Gérard Daniel. Surnommé ainsi, à cause de son dynamisme et ses différentes interactions dans la communauté haitienne de Brooklyn; il aimait bien son pseudonyme. Cette identité fut popularisée par les émissions Éddy Publicité et Moman Kreyol de New York et a caressé toutes les lèvres de la Martinique, de la Floride et des autres antilles.
Comme Marcel Bichotte et Gérard Élie Blain, son premier instrument est la clarinette qu’il apprit à manipuler dans la fanfare du Lycée Toussaint Louverture sur la direction du sergeant de l’armée d’Haiti Antoine Saint Aroman. Après qu’il ait contemplé Jean Robert Damas sur scène, il embrassa lui aussi le sax alto pour traduire ses sentiments et ceux d’autruis. Avec Les Shelberts, Les Pachas du Canapé Vert, il débuta dans la musique du genre Kompa puis, il s’intégra dans la troisième génération des Shleu Shleu dirrigée par Serge Rosenthal. Rentré à New York avec Les Shleu Shleu en 1974, troisième génération, il décida de rester aux cotés de sa mère et d’autres parents. Saxophoniste d’une extrème sensibilité qui témoigne du respect pour ses ainés; il rend de très souvent hommages à ses contemporains. Quand en 1994, Tony Moise, maestro des Shleu Shleu, première génération, imprima le CD ‘Shleu Shleu rencontre Joe Trouillot’, il m’appella au studio de Moman Kreyol pour me dire combien que le son du saxophone dans ‘Premiere Chanson” est moelleux, vibrant ‘, c’est un autre Tony disait-il; c’est du Stan Getz. Juste après cette conversation, le compliment de Gérard fut transmis au maestro. Il a aussi mis en relief de temps à autres les saxophonistes qui comme lui reçurent la dynamique et la téssiture du sax et de la clarinette du maestro Saint Arroman. Citons, comme examples, les noms de Réginald Rock, Lionel Dorlette, Deslhomme Jeune et Jude Maurélus, tous des saxophonistes de la fanfare du Lycée Toussaint Louverture. Pour améliorer son embouchure, il passa des heures d’entrainement en vue de maitriser les muscles qui controlent la colonne d’air de l’instrument et coordonner ses mouvements pour atteindre la note juste et aussi pour maitriser son timbre quelque soit le volume (1994). Les retombés de ces éxercices ont engendré des fruits juteux qui l’ont permis de produire une belle finesse mélodique et un son éxpréssif et sensuel.
Fils de Gérard Daniel père, un Haitien/ Dominicain, rentré en Haiti vers l’âge de cinq ans et d’une haitienne nommée Miralda Noel Daniel, Gérard Daniel fils est originaire de Port-au-Prince Haiti oú il vécut jusqu’à l’âge de 18 ans. Sa soeur, Jacqueline, fut membre de la fanfare du Lycée Des Jeunes filles; elle jouait aussi la clarinette. Son oncle, Raphael Daniel de la MBC fut lui aussi trompétiste d’occasions de la Cadence Rampas pendant les trois jours gras.
Gérard rapporte qu’il venait juste de l’école quand il reçut à Brooklyn la visite de Lesly Lavelanet (le batteur) qui lui proposa de créer un groupe musical. Au cours de cette même semaine, il rencontra Alix Jacques, Roger Jean Baptiste (Ti Yale) qui ne demandaient pas mieux qu’une telle initiative. Pendant ce temps, Alix Jacques fît appel à Panthal Guilbaud , Eddy Chatel, Jean Robert Jean et voilà, le groupe était prêt à s’aventurer. Ces musiciens ont lancé leur premier disque sans être connu du grand public au milieu de 1975 et le 12 août de la même année, ils avaient conquis la clientèle du préstigieux night club ‘Olympia Palace; le reste est chose notoire.
Membre des Fanfares du Lycée Toussaint Louverture et d’Aléxandre Pétion, Ti Gérard pendant sa journée mélodieuse a vogué de fanfare en fanfare, de mini Jazz en mini jazz pour s’arréter au Djet X ‘ La Douce Qui Vient”oú les mélodies et le métronome dégagent des sources intarrissables de joie. Il composa Pardon, Zanmi, Pou rezon nou, Rossignol, Mizè malere, Bambauche 84, love To Love etc. Gérard n’était pas l’unique compositeur de Djet X. De connivences avec F Fleury, pour protester contre l’étiquette ‘ porteur de germes de SIDA’ adjugée à la communauté haitienne par FDA et ses acolytes, il nous dota de 20 avril (Pon An Souké) pour marquer la présence haitienne sur le Brooklyn Bridge qui ait vacillé cette structure. En effet, Alix Jacques, Eddy Lavelanet, Max Badette, Luckner Dor, Roger Jean Baptiste demeurent tous de musiciens de talents qui nous aident à oublier nos cauchemars, nos déboires pour embrasser la vie comme elle arrive.
Discographie Partielle de Gérard Daniel
Orchestre | Album | # De Référence | Label | Année |
Les Shelberts | Grosse Frappe/ A la campagne | 1004 | Shango | 1972-1973 |
Les Shelberts | Les Shelberts | 1007 | Shango | 1972-1973 |
Les Shleu Shleu | Toujours le Même 4-3 | 012 | S S | 1974 |
Djet X | Volume I | 125 | Macaya | 1975 |
Djet X | Volume II | 131 | Macaya | 1976 |
Djet X | Expression | 136 | Macaya | 1977 |
Djet X | UFO | 001 | Marc Records | 1978 |
Djet X | Le Freak | 143 | IBO | 1979 |
Djet X | Fièreté 4 | 660 | Musique/Antilles | 1979 |
GM Connection | You and I | 1105 | Mini Records | 1980 |
Djet X | Le Notre | 1117 | Mini Records | 1981 |
Djet X | Ret Cezi | 1134 | Mini Records | 1982 |
Djet X | Chancy Records | 8018 | Chancy Records | 1983 |
Djet X | Bambauche | 1839-5 | J.D Productions | 1984 |
Djet X | Zanmi | 4374 | P | 1988 |
Djet X | Egal Ego | 1211 | Mini Records 1 | 990 |
Djet X | Vision | 007 | Marc Records | 1993 |
Djet X | Haitian Stars | 001 | Debbs | 1994 |
Dans moins de trois mois, l’art haitien a vu s’écrouler cinq artistes de générations différentes. Ils sont Boulo Valcourt, Joseph Emmanuel Charlemagne, la femme d’éxcéption, Emerante De Pradines, Serge Duviella et Gérard Daniel fils. Malgré leur absence, ces artistes demeurent des sources intarrissable de joie et de consolation. Nous ésperons que nous ne sommes pas entrain de revivre le phénomène de 1985. Ce n’est qu’un au revoir, étoiles de ma jeunesse, ce n’est qu’un au revoir.
Gérard dit-on serait mort de froid dans la nuit du 7 au 8 Janvier 2018. Il est parti pour un long voyage; le voyage sans retour dont bon nombre d’entre nous en ont marre. Sa vie a été célébré en Floride, Martinique, Queens et Brooklyn par ses parents, amis et frères musiciens. Au Caribe Funeral Home de Brooklyn, la génération des musiciens de 1970 était présente. Nous avons pu noter la présence de Alix Jacques, Renand Thybulle, Mark Frederic, Max Badette, Jean Robert Jean et Panthal Guilbaud, la belle équipe qui avait travaillé avec Ti Gérard. Fred Paul et Dada Jacaman étaient eux aussi présents aux salons funéraires ce vendredi 19 février pour saluer les parents et amis que ce deuil afflige. Tabou Combo s’était fait représenter par Shoubou, Reynald Valmé et Jean Claude Jean. De son vivant, Gérard éprouvait une grande admiration et beaucoup de respect pour le maestro Loubert Chancy. Par contre, de la Floride, ce poête du Sax s’est deplacé pour rendre hommages à l’autre poête du Sax Gérard Daniel. Jean Elie Thelfort, Johny Frantz Toussaint, Camille Armand des Skasha, Denis Lefranc de la Radio Diffusion Haitienne, Romero Volcy figuraient eux aussi dans l’assistance. Repose en paix , mon frère.
Adrien B. Berthaud
Février 2018
Archives/Musique Dominique Janvier
Photo Smith Jean-Baptiste
Entrevue de Raphael Daniel fils 2/21/2018
Entrevue de Gérard Daniel Fils 1994
Observations de l’artiste au fil des ans